Jerry Lewis - Docteur Jerry et Mr Love (1963)

Fiche technique Titre   Docteur Jerry et Mr Love Genre   Comédie Année   1963 Origine   USA Réalisateur   Jerry Lewis Titre original   The Nutty Professor

Distribution Julius Kelp Buddy Love Jerry Lewis Stella Purdy Stella Stevens Dr Warfield Del Moore

Les premières minutes

Julius Kelp est professeur de chimie dans une université Américaine. Devant des élèves visiblement peu intéressés, il réalise une expérience qui consiste à mélanger des tas de produits de couleurs différentes. L'étrange mixture se met tout d'abord à fumer, puis à bouillonner, puis finit par exploser. L'onde de choc est si forte qu'elle fait trembler tout le campus, déplaçant les tableaux accrochés au mur et renversant les plantes vertes. Le Dr Warfield, doyen de l'université, devine immédiatement lequel de ses professeurs est à l'origine de l'explosion. Il entre dans une colère folle et envoie sa secrétaire, Mlle Leemon, chercher le fautif.

Elle arrive dans la salle de classe de Julius alors que les pompiers viennent d'en enfoncer la porte pour évacuer les élèves. Ils ont le visage noirci par la fumée, toussent, mais sont heureusement tous indemnes. Par contre, aucune trace du maladroit professeur. Debout sur la porte enfoncée par les pompiers, Mlle Leemon se demande ce qui a bien pu lui arriver lorsque... quelqu'un frappe à cette porte.

Le film en quelques mots

Les films de Jerry Lewis m'ont fait hurler de rire lorsque j'étais gamin, mais je dois admettre qu'ils me font moins rire aujourd'hui. Que voulez-vous, on change en vieillissant. Il existe néanmoins une exception : Docteur Jerry et Mr Love. Je considère en effet ce film comme son chef-d'œuvre. Acteur principal, mais aussi co-scénariste et réalisateur, il est intervenu sur tous les aspects du film et c'est probablement pourquoi il est si réussi.

Même s'il ne contient qu'un seul bonus, en l'occurrence un documentaire sur les grands moments de la Paramount qui nous laisse un peu sur notre faim, le DVD de Docteur Jerry et Mr Love est un modèle du genre. C'est un exemple de remastérisation réussie. Non seulement l'image est de si bonne qualité qu'on pourrait se demander si le film n'a pas été tourné le mois dernier, mais la bande son a si bien été restaurée que les chansons interprétées par Jerry Lewis sonnent comme sur les grands disques de jazz des années cinquante.

L'idée de départ de ce film était plutôt risquée. Le Dr Jekyll et Mr Hyde de Stevenson est l'archétype de la nouvelle fantastique, et il fallait oser se lancer dans une version comique de ce grand classique... Mais à l'arrivée, le résultat est pour le moins étonnant, car le film plaira à la fois aux enfants et aux adultes, et pour des raisons différentes.

Les enfants riront beaucoup en assistant aux mésaventures de ce petit professeur à la voix de fausset et à la carrure de moineau, qui a si peu d'autorité qu'il se fait chahuter au point de finir un de ses cours prisonnier d'une étagère dans laquelle un de ses élèves l'a encastré. Ils riront encore plus de ses perpétuelles gaffes et des efforts qu'il déploie pour faire du sport et devenir costaud.

Les adultes, eux, auront peut-être envie de réfléchir après avoir regardé certaines des scènes. D'un côté, il y a Julius que le doyen de l'université traite comme un larbin, l'envoyant chercher des verres de limonade et lui ordonnant d'assister en tant que surveillant à la fête de la promotion. De l'autre côté, il y a Mr Love qui a tant d'emprise sur ce même doyen qu'il parvient à lui faire réciter du Shakespeare debout sur une table, un canotier troué sur la tête et... en caleçon ; ce Mr Love à qui le doyen envoie un télégramme dans lequel il le supplie presque d'assister à la fête de la promotion. Et pourtant, Julius et Mr Love ne sont en fait qu'une seule et même personne qui ne diffèrent que par leur physique, leur look, leur culot et leur arrogance vis à vis des autres. Deux poids, deux mesures... De là à conclure que, déjà au début des années soixante, tout n'était qu'une question d'image.

Mais qui a dit que « l'habit ne fait pas le moine » ?

Les meilleurs moments

Après avoir fait exploser sa classe, Julius se retrouve coincé sous la porte que les pompiers viennent d'enfoncer. Mlle Leemon, qui est partie à sa recherche, se tient debout sur cette même porte. Pour lui signaler sa présence, Julius a la présence d'esprit de... frapper à la porte. Mlle Leemon se baisse alors, lui ouvre la porte et le trouve encastré dans les décombres de la salle de cours. Cette scène désopilante, digne du grand Tex Avery, ne vieillira probablement jamais. D'ailleurs, l'influence de Tex Avery se fait aussi sentir dans le titre original du film. The nutty teacher aurait tout à fait pu être le titre d'un de ses dessins animés.

Pour améliorer sa condition physique, Julius se met à fréquenter les gymnases. Un jour, il s'essaie à l'haltérophilie mais, lorsqu'il laisse retomber les haltères, il oublie de lâcher la barre et se retrouve avec des bras de deux mètres de long qui touchent le sol. La nuit suivante, pendant son sommeil, il arrive à se gratter les pieds sans se baisser.

Julius s'apprête à tester pour le première fois son élixir. Comme dans toute adaptation de Dr Jekyll et Mr Hyde qui se respecte, les étapes de la transformation sont terribles et douloureuses, mais ici on est vraiment mort de rire devant le maquillage et les grimaces de Jerry Lewis.

Mr Love fait sa première apparition au Diable Pourpre, la boite favorite des étudiants de l'université (et par conséquent de Stella). Son magnétisme est tel que les gens s'arrêtent de parler à son passage et le regardent, stupéfaits. Il commence par boxer un consommateur qu'il trouve un peu trop impoli, puis il enseigne au barman un nouveau cocktail qui le fait tomber raide-mort dès la première gorgée. Il s'assied ensuite au piano, renvoie une partie des musiciens de l'orchestre et interprète la chanson du film, that old black magic, dans laquelle il swingue méchamment. Dans cette scène culte, Jerry Lewis se prend au jeu : de même que Julius vient de se transformer en Mr Love en buvant un verre de son élixir, le comique vient de laisser la place à un vrai crooner qui ressemble diablement à Dean Martin, son ex-partenaire au music-hall. Ici, il y a un véritable travail d'acteur ; la métamorphose ne consiste pas seulement à troquer les grosses lunettes, les cheveux en bataille, les dents de lapin et la blouse blanche maculée de tâches de produits chimiques de Julius contre un smoking à la mode et une coupe de cheveux impeccable. La psychologie de Mr Love est totalement différente de celle du professeur et Jerry doit véritablement créer un nouveau personnage. Et quelle voix ! On atteint des sommets lorsque les effets de l'élixir commencent à s'estomper et que la personnalité de Julius réapparaît petit à petit chez Mr Love qui lutte pour ne pas se laisser submerger. Timbre de voix, mimiques, attitudes, Jerry Lewis passe d'un personnage à l'autre à toute vitesse, jusqu'à ce que finalement Julius l'emporte et prenne la fuite pour ne pas être démasqué.

La nana

Dans Docteur Jerry et Mr Love la nana c'est Stella, dont le rôle est interprété par la belle Stella Stevens. Elle est à la fois élève de Julius et amoureuse de Mr Love. Qu'elle est belle dans la scène dans laquelle Julius, complètement sous le charme, l'observe et l'imagine successivement en robe du soir, en tenue de tennis, en robe de vamp et, pour finir en beauté, en maillot de bain !

Stella est le seul personnage du film qui ne soit pas caricatural. En effet, Julius est une caricature de prof, Mr Love de dragueur invétéré, le Dr Warfield de chef braillard (pléonasme) et Mlle Leemon de secrétaire dévouée. Seule Stella sort des sentiers battus et va au-delà des apparences pour découvrir les qualités cachées de son Julius/Mr Love. De plus, elle n'est pas dénuée de sens pratique car elle n'oublie pas, dans la dernière scène du film, de subtiliser deux bouteilles d'élixir avant d'entraîner Julius chez Monsieur le maire. Ainsi, elle aura droit à that old black magic pour elle seule...

Dernière mise à jour de cette page : 09/03/2008