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Joy of a Toy Continued |
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Town Feeling |
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The Clarietta Rag |
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Girl On A Swing |
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Song For Insane Times |
(Kevin Ayers) |
Stop This Train (Again Doing It) |
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Eleanor's Cake (Which Ate Her) |
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Lady Rachel |
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Oleh Oleh Bandu Bandong |
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All This Crazy Gift Of Time |
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Chronologie
Joy Of A Toy est le premier album solo de Kevin Ayers,
bassiste de Soft Machine de 1966 à 1968. Il est paru en
décembre 1969.
Le disque en quelques morceaux
Joy of a Toy Continued
Comme son titre semble l'indiquer, Joy of a Toy Continued
est la suite de Joy of a Toy qui figurait sur le premier
album de Soft Machine. Mais on constate rapidement que cette
suite n'a plus grand chose à voir avec le délire
pataphysique des Soft. Sa mélodie simpliste, ses fifres,
sa basse qui fait POUM, POUM et ses quelques « LA,
LA, LA » en guise de paroles donnent à Joy
of a Toy Continued des airs de générique pour
émission de variétés du samedi soir. C'est
vous dire...
Alors, s'agit-il d'une grosse daube ? On pourrait presque
le penser, si on ne découvrait rapidement à quel
point cette mélodie est entêtante. Une fois infiltrée
dans votre tête elle n'en ressort plus, et vous vous surprenez
à la siffloter ou à la chantonner à longueur
de journées. Et, même si vous en êtes le premier
étonné, même si ça énerve tout
votre entourage, vous serez bien obligé d'admettre que
Kevin Ayers vous a bien eu et que vous aimez ça.
Town Feeling
Pour continuer, voici une chanson triste. Il faut dire que
c'est le premier jour du printemps, et que pourtant dans les
maisons et dans les rues chacun à l'air de ne penser qu'à
lui. La mélodie, superbe, est aussi mélancolique
que les paroles et surprend à chaque écoute. Il
n'y a pourtant pas de miracle : Kevin Ayers travaille
avec les mêmes accords que les autres compositeurs, mais
il les arrange dans un tel ordre qu'on n'a jamais rien entendu
de semblable. Quelques instruments classiques finissent de donner
à Town Feeling une couleur qui n'est pas sans évoquer
Donovan.
Girl On A Swing
C'est l'histoire d'une fille qui fait de la balançoire
en chantant, et Kevin Ayers qui la regarde est en admiration
devant elle :
Girl on a swing, such a pretty thing
Avec cet orgue et cette guitare électrique qui font
penser au Pink Floyd de Syd Barrett, avec ce clavecin qui fait
penser à Lucy in the sky des Beatles, Girl On
A Swing baigne dans une atmosphère onirique digne
des meilleurs disques psychédéliques anglais. C'est
le genre de morceau un peu magique qu'on croit parfois entendre
le matin, lorsque le radio réveil vient juste de se mettre
en marche et qu'on est encore plongé dans un demi-sommeil.
Hélas, quelques secondes plus tard on est réveillé
et on s'aperçoit que le morceau en question est tout à
fait ordinaire. Mais, dans le cas de Girl On A Swing on
ne rêve pas. Alors, ne nous réveillons pas
et continuons d'écouter tranquillement ces petites merveilles
que Kevin Ayers nous a concoctées.
Song For Insane Times
Song For Insane Times est un morceau jazzy qui a pour
sujet l'époque de malades dans laquelle Ayers a l'impression
de vivre en 1969. Qu'écrirait-il, s'il devait refaire
cette chanson 30 ans plus tard ? Robert Wyatt et Mike
Ratledge sont aussi de la partie, et on dirait qu'ils ont sacrément
envie de swinguer. Si seulement quelqu'un, aujourd'hui, savait
chanter notre époque de malades avec autant de classe...
Ayers, Wyatt et Ratledge ensemble sur un même disque : quelques
années plus tôt on aurait appelé ce groupe
Soft Machine. Mais en 1969, ils ne s'agit plus que de trois potes
musiciens qui nous interprètent ici le morceau le plus
pro de tout l'album. Pour la petite histoire, c'est Song For
Insane Times qui m'a donné envie d'en savoir plus
sur eux et d'écouter les disques de Soft Machine.
Eleanor's Cake (Which Ate Her)
Encore une superbe ballade, rythmée par des arpèges
de guitare acoustique et une flûte, et qui fait penser
au Nick Drake de The thoughts of Mary Jane. Cette fois,
Kevin Ayers tente de consoler une dame qui pleure.
All This Crazy Gift Of Time
Un final "Dylanien" (guitares folk et harmonicas).
Donc, résumons-nous : joyeux anniversaire à
tous, nous espérons que vous voua amusez bien et que vous
finirez tous par... exploser.
Ah mais !
Pourquoi j'aime ce disque
Comment voulez-vous être objectif face à un disque
tel que celui-ci ? On ne peut qu'y aller au feeling
et avoir une réaction épidermique : soit
on déteste, soit on adore. Moi, j'adore...
Kevin Ayers est un perpétuel hédoniste, quelqu'un
qui n'aime pas travailler et qui traverse la vie en touriste,
sans de soucier le moins du monde de sa carrière. Pour
son premier essai en solo, il faut admettre qu'il a fait fort.
Quelques mois après avoir quitté Soft Machine,
il revient d'Ibiza (...) et retrouve l'Angleterre et sa grisaille.
Pour 4000 £ (ce qui représente quand-même
le double du budget initialement prévu), il entre en studio
et accouche de Joy Of A Toy. Ce disque à la pochette
toute jaune, comme le soleil d'Ibiza où une partie des
chansons a été composée (les plus gaies,
parait-il), est au départ un bricolage fait chez lui,
à Herne Bay dans le Kent. La maquette a été
réalisée sur un magnétophone antédiluvien
et la majorité des instruments utilisés a été
achetée... dans un magasin de jouets. C'est ce côté
"house music avant l'heure" que Kevin Ayers a essayé
de conserver en studio, et c'est très certainement ce
qui confère à Joy Of A Toy cette fraîcheur
et cette spontanéité si particulières. A
une époque où les ex-hippies commencent à
réaliser que les temps changent, alors que la violence
vient d'exploser dans les rues, Kevin Ayers continue à
rêver de jeunes filles qui font de la balançoire,
de belles dames qui pleurent et de ladies romantiques qui habitent
dans des châteaux. Par contre, lorsqu'il se réveille,
ce qu'il voit lui déplait tant qu'il se met à composer
des textes beaucoup plus lugubres. C'est ce qui explique l'alternance
entre chansons gaies et tristes sur Joy of a Toy.
On trouvera pèle-mêle dans cet album de la Pop
anglaise teintée d'un soupçon de psychédélisme
du meilleur goût, mais aussi du jazz moderne de toute beauté.
On y trouvera également du folk à l'anglaise et
quelques curiosités (Oleh Oleh Bandu Bandong et
ses paroles en... Malais). Plus les années passent et
plus cet ensemble disparate est agréable à écouter.
Après tout, si on cherche bien, on peut peut-être
encore trouver des jeunes filles qui font de la balançoire,
des belles dames qui pleurent et des ladies romantiques qui habitent
dans des châteaux.
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