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Fiche technique
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Titre |
Le Pacha |
Genre |
Policier |
Année |
1967 |
Origine |
France |
Réalisateur |
Georges Lautner |
Titre original |
Le Pacha |
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Distribution
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Le commissaire Joss |
Jean Gabin |
Quinquin |
André Pousse |
L'inspecteur Gouvion |
Robert Dalban |
Nathalie |
Dany Carrel |
Le directeur de la PJ |
Louis Seigner |
Serge Gainsbourg |
Lui-même |
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Les premières minutes
Par une froide journée d'hiver, au cimetière
de Saint Denis, quelques personnes assistent aux obsèques
de l'inspecteur Albert Gouvion tué "accidentellement
alors qu'il nettoyait son arme de service". Mais le commissaire
divisionnaire Joss, supérieur hiérarchique et ami
d'enfance de Gouvion, sait que cette version officielle est fausse
et que son vieil ami a été abattu par Quinquin.
Tout en se recueillant devant le cercueil de Gouvion, il repense
à toute la chaîne d'événements qui
ont abouti à sa mort, et à la façon peu
orthodoxe dont il l'a vengé.
Pourquoi j'aime ce film
Cette fois on ne rigole plus : avec Le Pacha
Georges Lautner a réalisé un film sérieux,
je dirais même un film qui donne froid dans le dos. En
effet, tout est froid dans Le Pacha. Quinquin, le truand,
assassine froidement ses anciens complices sans éprouver
la moindre émotion. Il prend même le temps de vérifier
les tickets de tiercé d'une de ses victimes, au cas où
ils seraient gagnants. Lorsqu'il apprend que son vieil ami figure
au nombre des victimes, Joss élabore froidement un plan
pour le venger. Il organise sans le moindre remord ce qu'il appelle
la Saint Barthélemy des truands, et fait encore
plus de victimes que Quinquin. Pendant ce temps les "amis"
de Gouvion, ceux avec qui il avait pris l'habitude de faire la
fête toutes les nuits dans les boites et les restaurants
à la mode, continuent de s'amuser comme s'il ne s'était
rien passé. Même Nathalie, sa petite amie, semble
à peine touchée par son décès. Les
décors eux-mêmes sont glaciaux : les extérieurs
ont été filmés dans des plaines enneigées
et noyées de brume. Brrr !
En ce qui concerne la distribution, on a l'impression que
les rôles de Joss et de Quinquin ont été
taillés sur mesure pour Jean Gabin et André Pousse,
tant ils sont à l'aise dans leurs personnages. Le Pacha
est aussi l'occasion de retrouver Robert Dalban dans un rôle
sérieux. Ce n'est plus le majordome alcoolique des Tontons flingueurs
ni l'escamoteur de cadavres de Ne nous fâchons pas.
Ici il joue le rôle d'un policier qui, après des
années de bons et loyaux services, s'est laissé
corrompre pour les beaux yeux de la jolie Nathalie.
Quant aux dialogues, ils sont signés par Michel Audiard.
Evidemment on ne s'ennuie pas en écoutant les tirades
de Jean Gabin et d'André Pousse.
- Dis donc Louis, tu trouves pas qu'tu pousses un peu ?
Où on va ?
- Ben j'te l'demande.
- Ah ben si c'est un interrogatoire, qu'est-ce que t'attends
pour faire monter des sandwiches et de la bière ? A
quoi tu penses ?
- J'pense que quand on mettra les cons sur orbite, t'as
pas fini de tourner...
- Et pourtant, c'était un drôle de colis
Albert ; comme copain d'enfance c'était pas
le Grand Meaulnes. Y fallait s'le faire... Il a jamais arrêté
de m'emmerder.
- J'ai des envies de voyages : l'Océanie,
Bora-bora, les vahinés. Tu connais ?
- Pourquoi, tu veux m'emmener ?
- On n'emmène pas des saucisses quand on va à Frankfort...
- Tu pourrais dire une rose quand on va sur la Loire. Question
de termes.
Avec son climat bien à lui, ses acteurs collant parfaitement
à leurs rôles et ses dialogues inoubliables, Le
Pacha est un des films policiers Français "sérieux"
que je préfère. C'est aussi un plongeon de 90 minutes
dans la fin des années 60, et c'est avec plaisir qu'on
revoit les fringues, le maquillage et la coiffure de Dany Carrel,
la si belle ligne des DS de Quinquin, le design des téléviseurs
et des meubles de l'époque. On se rappelle aussi que c'était
une époque durant laquelle on osait encore filmer un paquet
de clopes posé sur un bureau : blondes pour le commissaire
Joss, brunes pour le patron de la PJ. Autres temps, autres murs...
Les meilleures scènes
Voici les deux scènes que je préfère
dans Le Pacha.
- La scène de l'attaque du fourgon blindé
est devenue un classique du cinéma policier Français.
Lorsque le fourgon qui transporte des bijoux quitte Paris, un
complice prévient Quinquin qui lui tend une embuscade
sur la route d'Amiens. Dès que le fourgon est en vue,
Quinquin fonce sur les motards qui ouvrent la marche. Puis un
complice armé d'un bazooka tire dans la cabine de fourgon
qui est détruite. Gouvion qui escorte le convoi réalise
qu'il se trouve dans la ligne de mire du tireur, et il donne
un violent coup de volant qui le fait sortir de la route et lui
fait faire un tonneau. On accroche ensuite un câble au
pare-chocs du fourgon, et il est tracté à l'intérieur
d'un gros camion qui démarre immédiatement. Tout
est terminé : l'opération n'a duré
que quelques secondes. Le camion s'arrête ensuite dans
un hangar. On change ses plaques d'immatriculation et on ôte
sa bâche. C'est un camion tôlé, totalement
différent de celui recherché par la police, qui
reprend la route un instant plus tard. Les truands se rendent
finalement dans un endroit désert, et une bombe est placée
sous le fourgon blindé. En explosant, elle perce dans
son blindage un trou assez grand pour qu'un homme puisse aller
récupérer les bijoux. Pour finir, sa carcasse calcinée
est brûlée au lance-flammes, et il n'en reste bientôt
que quelques flammèches dans la neige.
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- La scène de l'enregistrement de Requiem
pour un c... par Serge Gainsbourg est aussi une scène
culte. Gainsbourg est en studio en train d'enregistrer, et Emile
"le Génois" son bassiste figure au nombre des
suspects de l'attaque du fourgon blindé. Joss l'interroge
entre deux prises, ce qui nous donne cette brève séquence
durant laquelle Gainsbourg, qui sort de la cabine d'enregistrement,
croise Gabin qui y entre.
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La BO
La BO du Pacha a été composée
par Serge Gainsbourg. A l'exception des chansons Requiem pour
un c... et Harley Davidson (interprétée
comme de juste par Brigitte Bardot) elle est essentiellement
constituée de morceaux instrumentaux qui laissent la part
belle aux percussions. Malheureusement pour ses fans, BB n'apparaît
pas dans le film : Léon "de Lyon"
écoute Harley Davidson sur son autoradio lorsque
Quinquin l'abat. Dans sa version instrumentale, interprétée
à l'orgue dans la scène où les deux fourgonnettes
des P&T vont se jeter dans une embuscade (encore une...),
Requiem pour un c... porte vraiment bien son titre et
sonne comme un requiem.
On peut retrouver ce morceau sur de nombreuses compilations
de Gainsbourg, mais également sur le CD Serge Gainsbourg : chansons
et musiques de films, album uniquement consacré à
des BO composées par le grand Serge. C'est l'occasion
d'écouter des morceaux plus rares, par exemple le thème
de La Horse de Pierre Granier-Deferre.
La nana
Dans Le Pacha la nana est Nathalie, dont le rôle
est interprété par la belle Dany Carrel. Je ne
sais pas si c'est l'époque qui voulait ça, mais
j'ai l'impression que je vais encore me répéter
en écrivant qu'avec ses longs faux-cils, dont un battement
ponctue chacune de ses phrases, elle est merveilleuse. Donc Nathalie
Villar, barmaid dans une boite de nuit, est la petite amie de
Gouvion qui a besoin de plus en plus d'argent pour l'entretenir.
Comme elle est aussi la sur du trop célèbre
truand Léon Villar dit Léon "de Lyon",
Gouvion ne tardera pas à faire quelques extras qui lui
permettront d'arrondir ses fins de mois. Lorsqu'elle apprend
que Gouvion et son frère ont été éliminés
par Quinquin, elle accepte de collaborer avec Joss. Mais Quinquin
l'abattra avant qu'elle ait le temps de se servir de son arme,
et toujours aussi impassible il se servira ensuite un verre pour
arroser l'événement.
La réédition
en 
Pour sa réédition en DVD de juin 2003, Le
Pacha bénéficie d'un traitement de faveur : il
est en effet disponible sous forme d'un coffret de deux DVDs.
Le premier volume contient le film, des actualités
de 1968 et le commentaire audio de Georges Lautner et Olivier
Marchal qui est un vrai régal. Comme pour les autres rééditions
de Lautner (Les tontons
flingueurs, Les Barbouzes
et Ne nous fâchons pas), la remasterisation en THX
est sublime. On redécouvre avec plaisir certaines scènes
du film qu'on croyait pourtant bien connaître (la scène
de la boite de nuit avec ses flashes stroboscopiques, celle où
Joss et Nathalie marchent dans la rue en pleine nuit au milieu
des vitrines décorées pour Noël). Le Pacha
reçoit enfin le lifting qu'il méritait et désormais
on est certain qu'il ne vieillira jamais.
Il ressort du commentaire audio une évidence qui pourtant
m'avait échappée. Si ce film est aussi bon, c'est
parce qu'il était en avance sur son époque. Aujourd'hui,
l'attaque d'un fourgon blindé au bazooka, la violence
de certains interrogatoires "musclés" ou le
fait que des policiers puissent se déplacer en voiture
de sport n'étonnent plus personne car ce genre de scènes
est monnaie courante dans le cinéma actuel. Mais dans
les années soixante, tout était différent.
Le rythme des films policiers était bien moins soutenu,
l'aspect psychologique l'emportait presque toujours sur l'action.
A la fin du film, le coupable tendait ses poignets pour qu'on
lui passe les menottes en disant « Bravo commissaire,
vous avez gagné. » et le héros, qui
incarnait le commissaire en question, n'avait besoin ni d'une
moto ni d'un hélicoptère ni d'une mitrailleuse
lourde ni d'un lance roquettes pour le convaincre de monter dans
le panier à salade. Les policiers d'avant Le Pacha,
dans la réalité comme dans les films, travaillaient
dans des locaux poussiéreux et non pas dans des bureaux
modernes meublés en style design et équipés
des dernières nouveautés en matière de télécommunications.
En plongeant Jean Gabin dans la frénésie, les couleurs,
les bruits et aussi la violence des sixties, Georges Lautner
a non seulement été le précurseur des polars
des décennies suivantes mais il a aussi eu une vision
assez précise de ce que serait le travail de la police
moderne.
Le second volume contient des bonus parmi lesquels :
- Requiem pour la police à Papa,
un documentaire qui a pour sujet le réalisme dans Le
Pacha. Les vrais policiers sont-ils vraiment comme Jean Gabin
dans le film ? On y apprend que certains d'entre eux
se sont découverts une vocation pour ce métier
après avoir regardé... un film ou bien un feuilleton
policier.
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- Gabin vs. la bande à Lautner,
un reportage sur Jean Gabin. Au travers des interviews de ceux
qui l'ont connu, on découvre que derrière le monstre
sacré se cachait un technicien respecté pour sa
connaissance de son métier. Rien qu'en regardant le type
d'objectif qui allait être utilisé pour une scène,
il savait comment il devrait jouer pour être le plus à
son avantage.
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- Portrait d'un film, un reportage tourné
lors de la sortie en salles du Pacha.
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