|
Metroland |
Cooksferry Queen |
Sibella |
Bathsheba Smiles |
Two-Faced Love |
Hard on Me |
Heroes in the suburbs |
Crawl Back (Under my Stone) |
Uninhabited Man |
Dry My Tears and Move On |
Walking the Long Miles Home |
Street cries and stage Whispers |
The Sights and Sounds of London
Town |
That's All, Amen, Close the Door |
Hope You Like the New Me |
|
Chronologie
Mock Tudor est paru le 24 août 1999.
Le disque en quelques morceaux
Cooksferry Queen
Le disque commence très fort, avec ce morceau rapide.
Le groove de la guitare électrique fait penser d'emblée
au rock des années cinquante et au skiffle du début
des sixties. Quant à Dave Mattacks, il se laisse pousser
la banane et se prend, l'espace d'une chanson, pour le batteur
des Stray Cats. Richard Thomson nous décrit ici sa banlieue
de Londres et toutes ses désillusions d'adolescent :
Il y a une maison dans une allée
Parmi les squats et les loyers modérés
D'une ville sans futur
Mais c'est là que mon futur se trouve
Sibella
Avec son refrain entraînant et ses churs sixties,
Sibella est une des chansons les plus joyeuses que Richard
Thomson ait jamais composées. Et pourtant... Il s'agit
de l'histoire de deux amoureux qui ne vont pas du tout ensemble.
Sibella
Nous, ensemble, ça ne tient pas debout
Mais mon cur est encore avec toi
Et de ponctuer ses dires d'un de ces solos de guitare insensés
dont lui seul a le secret.
Walking the Long Miles Home
Il se fait tard. Richard, qui vient de rompre avec sa petite
amie, a raté le dernier bus et doit rentrer à pied
dans sa banlieue. Il marche seul dans la ville endormie, avec
la lune pour seule compagne et le rythme de ses pas pour battre
la mesure de son blues.
Walking the Long Miles Home possède un petit
quelque-chose de Country que j'adore.
The Sights and Sounds of London Town
Un superbe morceau acoustique qui nous raconte l'histoire
de quatre personnages que Richard est allé rechercher
dans ses souvenirs. Il y a tout d'abord Gillian, la fille de
Doncaster qui laisse ses gamins tous les vendredis soirs pour
aller exercer le plus vieux métier du monde dans les rues.
Puis c'est au tour de Jean-Paul, le Français natif de
Toulouse, qui vit de petits boulots en espérant devenir
un jour DJ. Arrive ensuite Jackie, guère mieux lotie par
le destin, qui ne sera probablement jamais l'artiste qu'elle
aurait voulu être. Le dernier de la liste est Mickey qui
court dans Soho, comme un rat dans un labyrinthe.
Brrr ! Ca ne fait que confirmer que Londres n'est
pas pour tout le monde la ville-lumière qu'elle est censée
être. En écoutant cette chanson, on ne peut s'empêcher
de penser à une autre chanson magnifique consacrée
à cette ville : Streets of London de
Ralph McTell.
That's All, Amen, Close the Door
That's All, Amen, Close the Door est à la fois
la chanson la plus triste et la plus belle de Mock Tudor.
J'ai lu quelque-part, dans une interview de Richard Thomson,
que ses paroles sont destinées aux fans de Sandy Denny,
son amie décédée des suites d'une chute
dans un escalier en avril 1978 :
Elle a donné
Tout ce qu'elle devait donner
S'il vous plaît, n'en demandez pas plus
Les refrains sont encore plus poignants :
Il y a des gens précieux et rares
Qui tracent le chemin
Elle a jailli du puits
Et son talent a débordé
Mais il n'existe pas de coupe
Pour conserver le passé
Trop riche pour être bu
Trop riche pour durer
C'est tout
...
Il y a ceux qui osent
Et ceux qui brillent
Et ceux qui sont à la traîne
Et ceux qui récoltent
Ce que d'autres ont semé
Quand la mémoire flanche
Qui peut savoir
La chanson se termine par un solo de guitare. Mais ce n'est
pas un des solos concis du Richard Thomson d'aujourd'hui ;
c'est son alter ego, le lead guitarist de Fairport Convention,
qui émerge des brumes du passé le temps de faire
un clin d'il à sa vieille copine. Et le moins qu'on
puisse dire, c'est qu'il n'a pas perdu la main.
C'est d'ailleurs le seul bémol du disque : ce
solo est un killer, un brûlot du même calibre que
ceux de Sloth et de Poor Will & The Jolly Hangman
sur Full House. Alors, pourquoi
l'avoir tronqué au montage, au moment où Richard
commençait juste à se lâcher ? On aimerait
bien pouvoir écouter un jour la version non expurgée
du morceau, par exemple sur une compilation.
Pourquoi j'aime ce disque
Comme beaucoup d'albums de Richard Thomson, Mock Tudor
est un disque à la fois personnel et touchant.
Personnel, il l'est parce que Richard nous y entraîne
dans ses propres souvenirs d'adolescence, à une époque
où la Grande Bretagne, au sortir de la seconde guerre
mondiale, était une nation prospère. Dans les banlieues
de Londres fleurissaient des maisons de style Mock Tudor, ce
faux style Tudor inventé dans les années vingt.
Les gens affichaient leur réussite sociale à travers
les automobiles garées devant leur domicile et les tondeuses
flambant neuf à l'aide desquelles ils tondaient leurs
pelouses. Mais quelle musique choisir, pour illustrer de tels
souvenirs ? Tout simplement la musique que Richard écoutait
à l'époque. Mock Tudor est donc assez éloigné
du reste de sa discographie : il est gorgé de Pop
music anglaise, de mélodies accrocheuses et de guitares
qui cognent. Tous les titres ont été enregistrés
"live in the studio", avec un son brut, et doivent
méchamment cartonner en concert.
Touchant, il l'est parce que Richard ne triche pas. Derrière
cette façade resplendissante se cachait une société
qui fabriquait déjà des exclus (The Sights and
Sounds of London Town) et où des gens qui appartenaient
à des classes sociales différentes n'avaient pas
le droit de s'aimer (Crawl Back (Under my Stone)). Son
adolescence n'a donc pas été drôle et il
ne le cache pas. Aujourd'hui, lorsqu'il se penche sur ses états
d'âme, il est tout aussi honnête. Dans That's
All, Amen, Close the Door, il s'interroge :
M'en souciais-je
Etais-je amoureux
Assez amoureux pour savoir
Dans cette page, je n'ai évoqué que mes chansons
préférées, mais Mock Tudor est un
excellent disque à écouter de bout en bout. Aujourd'hui,
un tel album pourrait même sembler indigeste aux yeux d'un
public non habitué. Trop copieux : trop de beaux
textes, trop de belles mélodies, une envie trop pressante
de jouer de la guitare et de chanter qui suinte de chaque titre.
Aujourd'hui, la musique est comme la bouffe : basses
calories. Pour toucher le jackpot, il faut des textes qui ne
fassent pas trop mal à la tête, des mélodies
faciles à retenir et surtout pas de prouesses instrumentales.
Heureusement, il y eut une époque où un artiste
pouvait se permettre d'être à la fois un grand auteur-compositeur
et un excellent instrumentiste. Richard Thomson est un de ces
oiseaux rares, Sandy Denny en était une autre. Alors,
imaginez ce qui pouvait sortir du studio lorsque ces deux-là
travaillaient ensemble. Mock Tudor me laisse exactement
les mêmes impressions que Sandy
ou The North Star Grassman
And The Ravens, disques sur lesquels Richard tenait le manche
au début des seventies : impression d'honnêteté,
de sérieux et de classe, impression d'en avoir eu enfin
pour mon argent (ce qui n'est pas si fréquent).
Souvenirs, souvenirs...
Le dernier disque d'un siècle, ce n'est pas rien...
Et bien, Mock Tudor a été mon dernier disque
d'avant l'an 2000. Il se trouvait même sur ma platine le
31 décembre 1999 à minuit, lorsque les douze coups
ont sonné. |